Le plafond de Chagall de l’Opéra Garnier bientôt décroché ?
Installé en 1964, l’actuel plafond du Palais Garnier, peint par Marc Chagall, recouvre en fait une œuvre originale de Jules-Eugène Lenepveu. Ses ayants droit réclament qu’on la voit à nouveau.
11 avril 2023
- Inauguré en 1975, le Palais Garnier présentait jusqu’en 1964 un plafond peint par l’artiste angevin Jules-Eugène Lenepveu, proche de l’architecte Charles Garnier à l’origine du monument. Il représentait Les Muses et les Heures du jour et de la nuit, comme son nom l’indique, dans un style de peinture classique du XIXe siècle. Aujourd’hui conservée au musée d’Orsay, l’esquisse a été récemment affichée à l’occasion d’une exposition dédiée à Jules-Eugène Lenepveu au musée des Beaux Arts d’Angers. Forts de cet événement, les ayants droit du peintre ont dès lors réclamé que le plafond original de la salle de spectacle soit à nouveau montré.
Or depuis 1964, c’est une œuvre de Marc Chagall qui recouvre le plafond de l’Opéra Garnier. Commandée par André Malraux, alors ministre des Affaires culturelles, elle avait été installée dans le but d’égayer une salle ancienne et peu colorée. « Ce plafond introduit dans l’Opéra la couleur et la lumière, affirmait le président Georges Pompidou lors de son inauguration. Il s’intègre admirablement dans le cadre de la vieille salle et y introduit quelque chose de neuf, qui en même temps rendra à cette salle un attrait plus vivant ». Une opinion peu partagée à l’époque, où ce changement provoqua de vives réactions du public, déçu de voir disparaître le classicisme original au profit d’une œuvre moderne ; mais l’œuvre conquit, par la suite, la majorité pour devenir finalement indissociable de l’identité du monument.
Marc Chagall, célèbre pour ses représentations bibliques particulièrement vivantes et joyeuses, a travaillé pendant un an sur cette toile représentant de célèbres opéras (Bizet, Verdi…), avec force musiciens et hommages à l’histoire de Paris. Mesurant 220 mètres carrés, installée à l’aide de 24 panneaux en polyester, cette œuvre est amovible ; argument supplémentaire pour les ayants droit de Lenepveu qui ont déclaré : « Désormais, nous demandons qu’on puisse voir enfin le plafond que Lenepveu a peint en 1875. Il a été classé comme le reste du Palais Garnier, en 1923. Or il est caché depuis 1964 sous le plafond de Chagall, prévu dès l’origine comme démontable ».
Le 9 mai prochain, les défenseurs du peintre comptent bien remporter leur bataille face à l’Opéra Garnier et au ministère de la Culture. Mais Martin Ajdari, directeur général adjoint de l’Opéra de Paris, a déjà livré une réponse au Figaro : « L’idée de déposer l’œuvre de Chagall, qui est un élément très emblématique du Palais Garnier, poserait de lourdes questions et n’est pas à l’ordre du jour ». Voilà de quoi rassurer les amateurs du plafond de Chagall.